L’observatoire français des toxicomanies, OFDT, a conduit le projet SAM, stupéfiants et accidents mortels : étude des conducteurs impliqués dans un accident mortel entre 2001 et 2003 dont l’objectif était de rendre compte du rôle des stupéfiants dans la survenue d’un accident mortel.Seules ont été inclues dans cette étude, les victimes décédées rapidement lors de l’accident.
Recherche systématique de stupéfiants chez les conducteurs impliqués dans un accident mortel
Depuis 1999, avant d’envisager une évolution de la législation, le gouvernement a souhaité disposer de donnes épidémiologiques, notamment sur le rôle du cannabis en cas d’accidents.
Le décret n 2001-751 du 27 août 2001 a donc instauré une recherche systématique de stupéfiants ( cannabis, amphétamines, cocaïne et opiacés) chez les conducteurs impliqués dans un accident mortel.
Ce décret se limite aux accidents aux conséquences immédiatement mortelles : ils correspondent aux accidents qui entraînent le décès d’au moins une victime alors que les forces de l’ordre sont encore présentes sur la scène de l’accident.
Le délai qui sépare l’heure de l’accident et l’heure de dépistage doit être le plus court possible ( article R 235-1).
Ce décret de 2001 prévoyait également la recherche ( mais pas le dosage) de médicaments psychoactifs en cas de dosage sanguin positif pour les stupéfiants.
Le décret n 2003-293 du 31 mars 2003 a supprimé cette recherche systématique de médicaments psychoactifs en cas d’accident mortel.
Lors d’un accident mortel, les forces de l’ordre dressent un procès verbal : une partie des informations saisies constituent les BAAC, Bulletins d’analyse des accidents corporels de la circulation routière.
Une importante base de données est donc constituée en France. Elle présente un grand intérêt pour la communauté européenne qui souhaite disposer d’analyses spécifiques dans le cadre du projet DRUID : driving under the influence of drugs and medicines.
Le groupe de recherche SAM a eu accès aux BAAC dressés par les forces de l’ordre entre le 1 octobre 2001 et le 30 septembre 2003 sur toute la France métropolitaine. A ces données ont été ajoutées les fiches des laboratoires d’analyses médicales qui précisaient la positivité à l‘alcool, aux stupéfiants ou aux médicaments.
L’objectif de ce travail était de rendre compte du rôle des différents stupéfiants dans la survenue d’un accident mortel de la circulation routière et d’évaluer la contribution de la consommation d’alcool et de médicaments psychoactifs à la survenue des accidents sous l’emprise des stupéfiants.
L’étude a porté sur 16 705 conducteurs impliqués dans 10 300 accidents.
3 grandes catégories de substances psychoactives ont été recherchés dans l’échantillon de l’étude
Stupéfiant, alcool, médicaments.
Un conducteur est considéré comme positif aux stupéfiants si la concentration sanguine de
- Cannabis : THC est supérieur ou égal à 1 ng/ml de sang
- Amphétamines : supérieur ou égal à 50 ng/ ml
- Cocaine : supérieur ou égal à 50 ng/ml
- Opiacés : supérieur ou égal à 20 ng/ml
Lorsque l’état du conducteur le permet, il bénéficie au préalable d’un test urinaire. Si le dépistage est négatif, il est considéré comme négatif aux stupéfiants.
La positivité à l’alcool est affirmée après un dosage sanguin ou son équivalent à l’éthylomètre qui met en évidence une concentration supérieur ou égale au seuil légal de 0,5 g/l de sang.
Si l’éthylotest est négatif, le conducteur est considéré comme négatif.
La recherche de médicament psychoactif dans le sang n’était prévue dans cette étude que chez les conducteurs positifs aux stupéfiants. Cette recherche systématique a été remise en cause avant la fin de l’étude.
Résultats
Parmi les conducteurs impliqués dans un accident mortel :
- 20% ont une positivité à l’alcool,
- 8% ont une positivité au cannabis.
La positivité à l’alcool est donc 3 fois plus élevée que celle aux stupéfiants.
Une positivité à l’alcool est deux fois plus fréquente chez les conducteurs positifs aux stupéfiants que chez ceux qui ne le sont pas.
Pour les conducteurs positifs pour les stupéfiants : 90% le sont pour le cannabis.
Faute d’un dépistage systématique et fiable des médicaments, l’association de stupéfiants avec des médicaments n’a pu être clairement estimée.
On observe une sur-représentation des hommes parmi les conducteurs impliqués dans les accidents mortels.
Ils ont également une plus grande propension à consommer de l’alcool et du cannabis.
A propos de la catégorie professionnelle des conducteurs impliqués dans ces accidents mortels, on observe :
- une très fréquente positivité aux stupéfiants et à l’alcool des chômeurs et dans une moindre mesure des ouvriers,
- une fréquente positivité mais limitée à l’alcool pour les artisans et les commerçants.
Pour les conducteurs professionnels, la fréquence de la consommation de stupéfiants ou alcool est très modérée.
2 conducteurs sur 3 sont considérés comme responsable de leur accident au sens de Robertson et Drummer. Les conducteurs responsables sont 2 fois plus souvent positif aux stupéfiants que les non responsables et 5 fois plus souvent positifs à l’alcool que les non responsables.
Une augmentation de la positivité au cannabis est observée en fin de semaine, de jour comme de nuit.
Cette étude SAM met en évidence 20% de conducteurs positifs pour l’alcool et 8% de conducteurs positifs pour le cannabis parmi les conducteurs impliqués dans un accident de la circulation mortel.
Ces résultats n’ont malheureusement pas pu être comparés à un groupe externe de référence : conducteurs sous l’emprise de stupéfiants et non impliqués dans un accident mortel, ou non impliqués dans un accident…
La banalisation de la consommation de cannabis en fait oublier ses risques sur la santé, y compris celle des autres : en effet, nous savons que la consommation de substances psychoactives détériore les capacités de conduite et augmente le risque d’accident.
La conduite sous l’emprise de stupéfiant ou d’alcool est sanctionné par le retrait de 6 points sur le permis, ce qui équivaut à une annulation du permis chez un jeune conducteur.
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